Journal de la guerre
de 1870
au Plateau d'Avron

7 DECEMBRE 

Le commandant SALMON prend le commandement de quatre bataillons de Marine, sous les ordres du Général d'HUGUES. Les ouvrages sont occupés par le corps franc d'artillerie organisé par le Capitaine POTHIER. L'artillerie, elle, est commandée par le Colonel de STOFFEL. Un poste sémaphorique est établi sur le plateau et les batteries sont consolidées. Les troupes s'organisent sur AVRON, mais la vie y est pénible, pas de baraquements et le froid est difficile à supporter début Décembre sous la tente. L'eau manque, les études faites pour pourvoir le Plateau d'une quantité d'eau potable suffisante resteront sans résultat définitif, la neige y pallie bien souvent.

Les batteries sont reliées par des tranchées, construites au jour le jour, sans projet arrêté. Une longue tranchée destinée le cas échéant à protéger la retraite s'appuie à droite au chemin de fer de Mulhouse, sous ROSNY à gauche au cimetière de ce village.

Tous ces travaux ne sont exécutés qu'avec des tâtonnements, sans hâte aucune... Le gel puis le dégel après la neige, rendent la terre difficile à remuer. Les travailleurs sont dans la boue jusqu'aux chevilles et chaque matin on trouve de l'eau remplissant les tranchées. Il n'y a ni abri, ni traverse, ni magasin blindé...

Les troupes campées sur AVRON peu surveillées, composées en très grande majorité de mobiles, passent leurs journées, non point à travailler mais à aller chercher des légumes du coté de VILLEMOMBLE ou à piller ce malheureux village……

NUIT du 12 au 13 DECEMBRE 

Les Prussiens sont considérablement gênés par l’occupation du plateau d’AVRON par les troupes françaises. Ils tentent d'occuper AVRON par surprise dans la nuit de Lundi à Mardi. Vers une heure, ils s'avancent sous les branches de la forêt de BONDY et arrivent de divers points sur VILLEMOMBLE. C'est en avant de ce village qu'ils prennent leur position de combat. Très forts au centre, ils déploient sur leurs ailes des bandes de tirailleurs qui doivent attaquer les positions françaises par la droite et par la gauche.

« A l'arrivée des renforts, la fusillade a pris les proportions d'une vraie bataille. Tandis que nos soldats sont ainsi occupés à droite et à gauche, le centre de l'ennemi est déjà parvenu à cent mètres du sommet, quand une décharge de toutes nos pièces fait d'épaisses trouées dans ses rangs. Les Prussiens fuient en désordre, poursuivis par nos obus jusque dans les bois. .. »

18 DÉCEMBRE

Comme à son habitude, le général TROCHU Gouverneur de Paris, fait placarder une proclamation annonçant une prochaine sortie des troupes françaises. L'ennemi peut donc commencer à se préparer pour affronter nos troupes. A cette date, la division d'HUGUES, toujours sur AVRON, compte environ 10.000 hommes et 60 pièces de canon. La brigade de BLAISE, composée de 4 bataillons des 111 ème et 112 ème régiments de marche, dresse ses tentes sur les glacis et dans l'ouvrage avancé du Fort de ROSNY.

Trente huit bataillons de la Garde Nationale se trouvent répartis entre le Fort de ROSNY et celui de NOGENT, soit environ 20.000 hommes peu entraînés.

 

 

 

 

 

Batterie Saxonne de 24 devant le Fort de Rosny

20 DÉCEMBRE

L'opération est reportée, en partie à cause des intempéries, au 21 au matin. Les troupes amassées dans le secteur indiquent aux Prussiens le lieu prochain de l'action. Déjà des renforts leur arrivent. Le Général VINOY, lors d'une inspection sur le Plateau, constate l'état lamentable de l'avancement des travaux.

L'artillerie considérable, placée sous les ordres de STOFFEL, est mal installée et mal protégée : parapets faibles, tracés des tranchées assez bizarres, magasin à poudre en voie d'achèvement, épaulements de campagne juste ébauchés... De plus, trois batteries de canons de 7 ont été retirées du Plateau et remises aux troupes de la 2 ème Armée en mouvement. Le Général TROCHU fixe le rôle d'AVRON dans la prochaine bataille.

L'artillerie à longue portée, placée au nord du Plateau, précédera de son tir la marche des colonnes de la 2ème Armée qui se dirigera vers le BOURGET. La brigade BLAISE devra atteindre VILLE - ÉVRARD et continuer plus à l'Est pour être en mesure d'atteindre avec son artillerie le port de GOURNAY. Dans la plaine, les gardes nationaux devront en partie remplacer la brigade SALMON sur AVRON où le Général d'HUGUES restera pour la défense de cette position.

21 DÉCEMBRE

La bataille pour la prise du BOURGET vient de commencer. Le Général BLAISE considérant la préparation d'artillerie suffisante, lance ses bataillons sur VILLE-ÉVRARD. Les troupes passent à NEUILLY sur MARNE et pénètrent dans l’asile d'aliénés de VILLE-ÉVRARD en cours de construction. Le Général BLAISE à la tête de ses troupes pénètre dans le parc et les bâtiments et commence à s'y retrancher.

L'ennemi, peu nombreux, pour la plupart des hommes du 8 ème régiment de Saxe fuit vers CHELLES. Les Français font quelques prisonniers. Les pièces Allemandes essayent d'arrêter l'offensive, mais les canons d’AVRON, de NOISY et de ROSNY font une « contre battue» efficace. Les obus ennemis tombent au bas du Plateau et s'enterrent dans le sol détrempé. Rectifié, le tir Prussien devient plus précis. Après 60 coups sans effet, un obus arrivant sur AVRON touche une batterie de marine. Plusieurs artilleurs sont blessés. Pris de panique, les ouvriers civils qui ont regagné le Plateau pour observer la bataille s'enfuient en désordre, semant le trouble parmi les autres troupes. MAISON BLANCHE est occupé avant midi. La position est mise en état de défense. Les murs d'enceinte sont en partie renversés ou crénelés.

Le Plateau d'AVRON ne cesse de combattre les batteries Prussiennes qui abandonnent leurs positions de NOISY le GRAND et de VILLIERS, mais bien vite les portées de canons sont insuffisantes. On déplace du Nord vers le Sud Est du Plateau une batterie de canons de 7 à portée plus puissante. Pendant ce temps, les troupes françaises subissent un échec au BOURGET.

Le Général de MALROY prend position dans NEUILLY sur MARNE. Des gardes nationaux s'arrêtent dans les premières maisons du village et allument de grands feux, cibles idéales pour les Prussiens qui leur expédient quelques obus, forçant les gardes à se disperser.

La brigade SALMON remonte sur AVRON. Les Généraux BLAISE et de MALROY considérant être suffisamment protégés par les feux du Plateau, insistent pour conserver les positions prises dans la journée. Par une dépêche, le Général TROCHU fait connaître le désastre du BOURGET. Il ajoute « J'ai à me réjouir de votre occupation de NEUILLY, VILLE - ÉVRARD et MAISON - BLANCHE... » Il félicite le Général VINOY pour l'action menée dans la Vallée de la Marne mais demande également d'évacuer les positions. Au moment où cette dépêche arrive, les bataillons restés à VILLE-ÉVRARD doivent supporter une attaque d'une inquiétante gravité. L’ennemi a décidé de reprendre VILLE-ÉVRARD.

« Nos hommes étaient au repos, préparaient le repas du soir et étaient dispersés de toute cotés. Le Général BLAISE avait placé un poste avancé à l'Est sur la route de STRASBOURG, quatre bataillons dans le parc, mais pas un homme dans la plaine entre le canal et la Marne et aucune patrouille. » L’attaque les prend par surprise, le Général BLAISE, cherchant à réunir ses hommes autour de lui, est tué d'une balle dans la poitrine. La panique s'empare des bataillons de la Garde Nationale, bien qu'ils soient séparés de l'ennemi, protégés par des bataillons de gendarmerie et couverts par le Plateau d'AVRON. Les hommes fuient d'abord au fort de ROSNY puis au glacis de l'enceinte (fortification de PARIS) et jusque dans Montmartre. Dans la nuit, durant la bataille, les troupes Françaises se mitraillent par erreur, les troupes prussiennes font de même. Des troupes saxonnes essaient de se glisser le long du canal. A MAISON-BLANCHE où SALMON n'a que peu de monde, quatre compagnies allemandes refoulent sur AVRON nos gardes nationaux.


 

 

 

 

 

 

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